Les dernières enquêtes nationales montrent une prévalence cumulée de l'asthme de plus de 10 % chez l'enfant âgé d'au moins dix ans et une prévalence de l'asthme actuel de 6 à 7 % chez l'adulte. La respiration sifflante (ou "wheezing" en anglais) est le symptôme cardinal de l'asthme. Sa présence précoce dans la vie constitue un facteur de risque majeur d'apparition de l'asthme. Les agents infectieux incriminés sont des virus respiratoires courants, principalement les rhinovirus (RV) et, dans une moindre mesure, le virus respiratoire syncytial (VRS), le parainfluenza, le métapneumovirus humain, les coronavirus, les adénovirus, les virus de la grippe et le bocavirus.
La présence excessive de bactéries, dont plusieurs font partie du microbiome, a également été associée à une respiration sifflante et des exacerbations aiguës de l'asthme, notamment Haemophilus influenza, Streptococcus pneumoniae, Moraxella catarrhalis, Mycoplasma pneumoniae et Chlamydophila pneumoniae. Ces infections sont fréquentes dans l'enfance et concourent au développement "normal" de l'immunité.
Le rôle d'anomalies génétiques ou de variations lésant l'épithélium des voies respiratoires en réponse à des stimuli environnementaux (infectieux et/ou allergiques) est désormais considéré comme un déterminant majeur de ces changements structurels précoces connus sous le nom de remodelage des bronches. Il peut être présent entre 1 et 3 ans, avant même la présence de manifestations allergiques ou la formulation du diagnostic de l'asthme.
Des infections virales répétées peuvent induire et pérenniser une hyper-réactivité bronchique (HRB). La sensibilisation allergique, qui précède ou accompagne le wheezing, entraine une inflammation de type Th2, tandis que les infections respiratoires courantes elles-mêmes favorisent ce type d'inflammation. Néanmoins, la plupart des enfants qui ont une respiration sifflante associée à des infections virales pendant la petite enfance et pendant la période préscolaire ne développeront pas d’asthme persistant.
De multiples facteurs, notamment la gravité de la maladie, l’étiologie virale, la sensibilisation allergique et l’exposome, sont associés à la persistance de la maladie. Il existe certes des index prédictifs comme l'API (Asthma Predictive Index) mais la plupart de ceux-ci ont une forte spécificité et une faible sensibilité.
Ainsi, il n’est pas évident de savoir quand se situe le début de l’asthme et, de plus, ses caractéristiques évoluent avec le temps. Une étude récente résume les connaissances actuelles et les développements en matière d’épidémiologie des infections de l’asthme chez les enfants, décrivant l’impact connu de chaque facteur pris individuellement et les mécanismes de transition de la respiration sifflante récidivante vers l’asthme.
En pratique, les virus respiratoires, principalement les rhinovirus, et la dysbiose bactérienne ont été identifiés comme des causes majeures de la respiration sifflante et des exacerbations de l'asthme chez les enfants plus âgés. La respiration sifflante au début de la vie a été fortement associée à la survenue ultérieure de l'asthme.
Le remodelage des voies respiratoires au cours des premières années de la vie, une prédisposition génétique (atopie), les anomalies de la barrière épithéliale des voies respiratoires contribuent pour une part variable selon les individus à la pérennisation de l'inflammation et des symptômes associés à l'asthme.
L’asthme du nourrisson est un cas particulier qui serait le monopole du VRS. Des études longitudinales au long cours ont montré que la persistance d'un asthme à l'adolescence était plus fréquent à l'âge de 13 ans dans le "groupe VRS" (43 %) que dans le "groupe témoin" (8 %).
De même, une sensibilisation aux principaux pneumallergènes était plus fréquente dans le groupe VRS que chez les témoins, estimée par les tests cutanés (50 % vs. 28 %) et par les dosages des IgEs (45 % vs. 26 %). Les mêmes résultats ont été observés 18 ans plus tard ce qui démontre la persistance des lésions probablement induites précocément sur des terrains prédisposés. Si l'asthme reste un modèle de maladie multifactorielle, le rôle d'infections respiratoires précoces semble néanmoins important dans l'apparition des lésions bronchiques favorisant la perennisation de l'affection.
Ref : JIM.fr 15/07/24
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