Si la vaccination anti-Covid a été un succès spectaculaire en termes de santé publique, elle ne doit pas être l'arbre qui cache la forêt. L’OMS a ainsi récemment fixé une liste de 17 pathogènes face auxquels la recherche d’un vaccin doit être prioritaire selon elle. Les responsables du département en charge de la vaccination insistent sur la priorité qui doit être donnée aux considérations sanitaires plutôt qu'au retour sur investissement des firmes pharamceutiques qui les développent.
C'est pourquoi l’agence onusienne a diligenté une étude pour dresser une liste des pathogènes pour lesquels le développement d’un vaccin est le plus nécessaire.
Pour établir cette liste de maladies prioritaires, les agents de l’OMS ont d’abord dressé une pré-liste de 26 pathogènes. Etaient inclus dans cette liste les pathogènes provoquant une maladie chez les humains et pour lesquels des recherches visant à élaborer un vaccin ont déjà été menées dans le passé. Etaient exclus en revanche les pathogènes émergents et ceux pour lesquels un vaccin existe déjà (sauf si ce vaccin ne remplit pas toutes les attentes en matière de prévention). L’agence onusienne a ensuite interrogé des responsables sanitaires des différentes régions d’activité de l’OMS qui ont analysé différents critères, comme le nombre de morts causées par ces pathogènes chaque année ou leur poids socio-économique, afin d’établir des priorités. Le manque de traitements et, pour les bactéries, la capacité d’antibiorésistance, ont également été pris en compte.
En a découlé, pour chaque région, un classement des pathogènes en fonction du degré de nécessité de développement d’un vaccin. Le classement dépend évidemment de la situation épidémiologique. En Afrique, au Moyen-Orient et en Asie, c’est l’l’élaboration d’un vaccin efficace contre la tuberculose pulmonaire à l’âge adulte qui est considérée comme la priorité. En Amérique, c’est le VIH qui est le pathogène face auquel un vaccin est le plus attendu. Enfin, les Européens veulent en priorité se protéger contre le staphylocoque doré. Ces trois pathogènes (HIV, staphylocoque doré, mycobacterium tuberculosis) sont dans le top cinq de toutes les régions et sont donc clairement la cible première des experts en santé publique.
En combinant ces différentes analyses, l’OMS a pu établir une liste mondiale plus restreinte de 17 pathogènes contre lesquels des vaccins doivent être mis au point en priorité. En se fondant sur les données des laboratoires de recherche et pharmaceutiques, l’agence onusienne a pu séparer ces agents pathogènes en trois groupes :
- Ceux concernant lesquels des vaccins ont été élaborés et sont sur le point d’être autorisés par les différentes autorités de régulation (dengue, streptocoque de groupe B, E. coli, tuberculose, VRS)
- Ceux concernant lesquels des travaux sont en cours et « doivent se poursuivre » (CMV, grippe, leishmania, salmonelle, norovirus, paludisme, shigella, staphylocoque doré)
- Ceux enfin à propos desquels les travaux de recherche sont pour le moment au point mort et rencontrent « des difficultés techniques substantielles » (streptocoque de groupe A, virus de l’hépatite C, VIH, klebsiella pneumoniae).
L’agence onusienne espère que les firmes pharmaceutiques, les gouvernements et les bailleurs de fonds s’appuieront sur ces travaux pour sélectionner les agents pathogènes sur lesquels il est nécessaire qu’ils concentrent leur attention pour la protection des populations concernées.
Ref : Mateusz Hasso-Agopsowicz et coll. : “Identifying WHO global priority endemic pathogens for vaccine research and development (R&D) using multi-criteria decision analysis (MCDA): an objective of the Immunization Agenda 2030”, eBioMedicine 2024; 105424 https://doi.org/10. 1016/j.ebiom.2024. 105424