On connait mal les risques d’un purpura thrombopénique immunologique (PTI) au cours de la grossesse : risques hémorragiques, risques de thrombopénie néonatale, complications hémorragiques néonatales, risques d’évolution vers un PTI chronique…Chez les femmes précédemment victimes de PTI la grossesse peut en outre être une source d'anxiété supplémentaire, le risque de conséquence foetale se surajoutant au risque intrinsèque. 2 études ont permis d'apporter aux médecins des informations afin d'optimiser le suivi.

L'objet d'une étude observationnelle précédente étaient de comparer 131 femmes enceintes atteintes de PTI  au même effectif de femmes non enceintes atteintes de PTI. Il a été montré que les femmes préalablement atteintes de PTI n'augmentaient pas leur risque de survenue de thrombopénie sévère (< 30×10.9/L) et d'hémorragie grave pendant la grossesse. Le principal inconvénient restait une modification du traitement du PTI, plus fréquente chez les femmes enceintes que chez les femmes non enceintes atteintes de PTI.
Concernant le risque de thrombopénie néonatale, celui-ci était de 27,2 %, dont 14 % de thrombopénie < 50×109/L. Ce risque de thrombopénie néonatale < 50×10.9/L était associé à des antécédents de thrombopénie néonatale lors de grossesses précédentes et à une numération plaquettaire maternelle < 50×10.9/L dans les 3 mois précédant l’accouchement.

L’objectif d'une étude très récente etait en complément de mieux décrire les caractéristiques et le devenir d’un PTI nouvellement diagnostiqué pendant la grossesse, et de comparer sa gravité pendant la grossesse à celle du PTI chronique préexistant. 
Sur une période de 4 ans, 34 femmes enceintes atteintes de PTI nouvellement diagnostiqué (nadir plaquettaire < 50×10.9/L et pas de thrombopénie avant la grossesse), suivies depuis le diagnostic de PTI jusqu'à la fin de la grossesse et au moins 12 mois après l'accouchement, ont été recrutées et comparées à 61 femmes enceintes souffrant de PTI préexistant au moment de la grossesse (depuis au moins 1 an et avec une numération plaquettaire < 100×10.9/L)
Sur les 34 PTI nouvellement diagnostiqués pendant la grossesse, 50 % ont présenté une thrombopénie sévère, avec des hémorragies chez 41 % d'entre elles. En comparaison avec le groupe témoin (61 femmes enceintes avec PTI chronique préexistant), il n’y avait pas de différence significative d'incidence de thrombopénie sévère et d’événements hémorragiques. Cependant, les femmes atteintes de PTI chronique ont subi moins d'interventions thérapeutiques que les femmes atteintes de PTI nouvellement diagnostiqué : 51 % versus 76 %.
Le pronostic obstétrical demeure bon en cas de PTI même si logiquement les complications sont plus fréquentes du fait des risques hémorragiques que pour une population normale: Accouchements par césarienne (44 % versus 21 %), accouchements prématurés (18 % versus 6 % à 8 %), hémorragie du post-partum (11,8 % versus 5 %).
En ce qui concerne le risque de thrombopénie néonatale, les chiffres de l'étude précédente sont confirmés : Huit (27,6 %) nouveau-nés ont présenté une thrombopénie néonatale, 6 (20 %) avec une numération plaquettaire < 50×10.9/L et 5 (16,7 %) avec une numération plaquettaire < < 30 ×10.9/L.
Lors du suivi à long terme, parmi les 34 femmes enceintes ayant eu un PTI nouvellement diagnostiqué, il s’est chronicisé (numération plaquettaire < 100×10.9/L) dans 39% des cas avec  recours à un traitement de seconde ligne pour le PTI dans un peu moins de la moitié des cas. Une rémission (numération plaquettaire >100×10.9/L) à 1 an était observée dans 60% des cas. À la fin de l'étude, 17/31 (51,8 %) femmes ont été classées en PTI chronique et 4 d'entre elles ont présenté une rechute de PTI au cours d'une grossesse ultérieure.

Au total, l'évolution d’un PTI nouvellement diagnostiqué pendant la grossesse est similaire à celle du PTI chronique connu avant la grossesse, de même que le risque de thrombopénie néonatale. Une évolution chronique du PTI après l'accouchement a été observé chez plus de la moitié des femmes ayant présenté un PTI nouvellement diagnostiqué au cours de la grossesse, ce qui n'est pas différent de ce qui est observé pour les PTI nouvellement diagnostiqués en dehors de la grossesse. Même si les risques de mortalité néo-natale restent très faibles, la prudence doit être de rigueur car le risque de rechute du PTI et de thrombopénie néonatale existe lors d'une nouvelle grossesse, y compris chez les patientes dont la numération plaquettaire s'est normalisée après l'accouchement.

Ref : JIM 26/11/24 - (1) Guillet S, Loustau V, Boutin E, et al. Immune thrombocytopenia and pregnancy: an exposed/nonexposed cohort study. Blood. 2023 Jan 5;141(1):11-21. doi: 10.1182/blood.2022017277 - (2) Guillet S, Loustau V, Boutin E, et al. Immune thrombocytopenia newly diagnosed during pregnancy: Outcome for mothers and neonates and comparison with chronic immune thrombocytopenia during pregnancy. Am J Hematol. 2024 Oct;99(10):2032-2036. doi: 10.1002/ajh.27432.