Le terme de microalbuminurie traduit la présence en quantité anormale d’albumine dans les urines. L’albumine, protéine de PM de 67 kD passe très peu le filtre de la barrière glomérulaire. Ce filtre est constitué de 3 structures superposées : l’endothélium fenestré, la membrane basale et les cellules épithéliales glomérulaires appelés podocytes, reliés par des jonctions intercellulaires spéciales (diaphragmes de fente), s’opposant au passage des macromolécules. Cette barrière relativement étanche laisse néanmoins passer environ 1 g d’albumine / jour dont la quasi-totalité est réabsorbé au niveau du tube contourné proximal. Un excès d’albumine dans les urines peut donc être due soit une augmentation de la quantité d’albumine filtrée, soit une diminution de sa réabsorption. Ce dernier mécanisme est rarement en cause car même dans les tubulopathies proximales, la fuite protéique concerne également d’autres protéines. Ainsi, l’apparition d’albumine traduit soit une élévation de la pression capillaire intra-glomérulaire (théorie hémodynamique, principalement en cause dans l’HTA), soit une altération de la triple barrière décrite ci-dessus. Elle commence par une dysfonction endothéliale, qui est généralisée à tous les endothéliums de l’organisme. Cette caractéristique explique qu’il s’agisse d’un facteur de risque cardio-vasculaire chez les diabétiques. Elle est nécessairement complétée par une altération de la membrane basal glomérulaire et des jonctions podocytaires, qui sont le reflet de l’atteinte rénale à proprement parler. Or ces 3 lésions ne se retrouvent de façon concomitante que dans la néphropathie diabétique, et ce de façon relativement précoce. Pour profiter de cette précocité, il faut pouvoir doser de faibles quantités d’albumine dans les urines en rapport avec des fuites de faible importance. C’est là le sens du terme microalbuminurie : il s’agit bien de doser de l’albumine, mais en utilisant des méthodes ultrasensibles (par turbidimétrie, néphélémétrie ou ELISA) capables de détecter ou mesurer des taux de l’ordre de 1 à 20 mg/ 24h. La mesure des taux chez des sujets sains a permis de fixer un seuil de normalité (habituellement estimé à 20 mg/24h)
Le recueil des urines sur 24 h reste la méthode de référence pour l’estimation de la microalbuminurie, car il est le reflet fidèle de la filtrartion glomérulaire sur le nycthémère. Toutefois, du fait de sa réalisation parfois difficile (activité professionnelle, recueil par excès ou par défaut pouvant fausser les résultats), des solutions de substitution ont été envisagées. Le prélèvement minuté (seuil de normalité = 200 ug/mn) nécessite une grande précision pour être interprétable. Le dosage sur simple échantillon est bien sûr la solution la plus pratique pour le recueil. Malheureusement la fiabilité de la concentration d’albumine en mg/l est un reflet très imparfait du fait de la variation du débit urinaire dépendant du u volume d’eau ingérée. Les urines du matin par exemple sont toujours plus concentrée, donnant ainsi des résultats par excès. Leur utilisation peut être envisagée uniquement dans un cadre de dépistage, un résultat négatif excluant la néphropathie diabétique et un résultat positif nécessitant un contrôle sur urines de 24 h. Enfin, la possibilité d’utiliser le rapport microalbuminrie/créatinurie sur échantillon a également été proposé (l’excrétion urinaire de créatinine dépendant principalement du débit de filtration glomérulaire). Il s’agit probablement du meilleur compromis entre simplicité de réalisation et fiabilité diagnostique, déjà largement utilisé dans les pays anglo-saxons. Le seuil de normalité est < 2 (en mg/mmol ou <30 en mg/g).
Pour diminuer au maximum l’incertitude liée aux facteurs pré-analytiques, il conviendra néanmoins de réaliser le prélèvement à distance d’un épisode infectieux, d’un exercice physique ou d’un orthostatisme prolongé. En raison des fortes variations individuelles, il faudra effectuer 3 dosages pendant une période de 1 à 6 mois et constater des valeurs supérieures au seuil à au moins 2 reprises pour affirmer l’existence d’une microalbuminurie pathologique.
Biotribune – 05/2006